Manifestations. Une commission évoque 23 mesures contre les débordements

Ouest France, 22 mai 2015 –

Mise en place après les manifestions de Sivens, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur le maintien de l’ordre et les libertés publiques a fait 23 propositions.

Cette commission a été mise en place en décembre dernier après les violentes manifestations contre le barrage de Sivens (Tarn), au cours desquelles un jeune manifestant, Rémi Fraisse, a été tué dans des affrontements avec les forces de l’ordre. Le gendarme lanceur de la grenade qui l’a tué a été exonéré de toute responsabilité.

« Mieux conjuguer ordre et liberté »

Mise en place le 3 décembre dernier à la demande des écologistes, la commission présente dans un rapport 23 propositions pour « mieux conjuguer ordre et liberté » et a été adopté à l’unanimité de ses membres, à l’exception de son président, l’écologiste Noël Mamère, et de la communiste Marie-George Buffet.

Deux d’entre elles visent à aménager les procédures judiciaires et administratives afin que les individus isolés ne puissent « prendre en otage la liberté publique de manifester ». Il s’agit d’abord d’appliquer le dispositif qui permet de prononcer une peine complémentaire d’interdiction ponctuelle de manifester en cas de condamnation pour des violences commises lors de troubles à l’ordre public (interdiction judiciaire).

Une interdiction de manifester

La seconde mesure propose de permettre la mise en œuvre, par arrêté préfectoral, d’une interdiction individuelle de participer à une manifestation (interdiction administrative). La commission prône aussi la création de nouvelles unités policières de médiation intégrées dans les manifestations et dispositifs de maintien de l’ordre, ainsi que la systématisation du recours à la vidéo afin de faciliter les interpellations.

Elle propose enfin de restreindre, et non d’interdire comme le réclamait Noël Mamère, qui parle d’un texte qui « justifie les dérives », l’usage de lanceurs de balles de défense en caoutchouc lors des opérations de maintien de l’ordre. Leur usage sera réservé « aux seules forces mobiles et aux forces dûment formées à son emploi dans le contexte particulier du maintien de l’ordre ».

Pas une enquête sur Sivens

« Nous n’avions pas vocation à investiguer sur ce qui s’est passé à Sivens, mais à réfléchir aux moyens de mieux articuler liberté de manifester et maintien de l’ordre républicain. Nous n’avons fait ni le procès des forces de l’ordre, ni le procès des manifestants », a assuré jeudi le rapporteur, le député socialiste de la Seine-Saint-Denis Pascal Popelin, lors d’une conférence de presse.

« Globalement, le système fonctionne, mais il doit s’adapter aux évolutions liées notamment à la nature des organisateurs, aux phénomènes de violence, aux nouveaux terrains (comme les ZAD, zones à défendre). On n’est plus dans le contexte d’un trajet Bastille-Nation encadré par un service d’ordre rompu aux discussions avec les pouvoirs publics », a-t-il également constaté.

Le rapport renié par Noël Mamère

Président de cette commission, Noël Mamère du groupe écologiste à l’origine de la création de la commission d’enquête, a voté contre le rapport. Un fait rarissime. Le texte a été adopté ce jeudi matin par 13 voix (PS, UMP, centristes…) contre deux, Noël Mamère et Marie-George Buffet (groupe gauche démocrate et républicaine).

« Je ne me retrouve pas dans ses conclusions et ses préconisations. L’idée, après la tragédie de Sivens, était de formuler des propositions pour que l’ordre public s’adapte au droit de manifester et c’est l’inverse qui se produit », a dénoncé Noël Mamère lors de la conférence de presse.

Le député a notamment critiqué « la concertation préalable obligatoire, qui réduit la possibilité du droit à manifester » et les contrôles d’identité collectifs.

Il a dénoncé « l’obsession des zadistes, qui ne sont pas tous des casseurs » et demandé l’interdiction des lanceurs de balles de défense, « une déclinaison du flashball qui, sous prétexte qu’il est peu létal est très utilisé par les forces de l’ordre, mais qui peut provoquer de graves blessures et même des décès ».

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